Vidéosurveillance et licenciement

 

Une caissière, licenciée pour faute grave, avait contesté son licenciement en se fondant sur le caractère illicite d’une vidéosurveillance. La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion, le casse en rappelant dans un arrêt du 10 novembre 2021 les obligations mises à la charge des employeurs en la matière (Cass. Soc. 10 nov. 2021, n° 20-12.263).

Tout d’abord, les salariés doivent être informés avant tout traitement de données à caractère personnel de l’identité du responsable du traitement ou de son représentant, de la (ou des) finalité(s) poursuivie(s) par le traitement, des destinataires ou catégories de destinataires de données, de l’existence d’un droit d’accès aux données les concernant, d’un droit de rectification et d’un droit d’opposition pour motif légitime, ainsi que des modalités d’exercice de ces droits. Cette obligation résultait de l’article 32 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, loi applicable en l’espèce (solution désormais prévue par le RGPD, art. 13).

Ensuite, en vertu de l’article L. 442-6 du code du travail, le comité d’entreprise doit être  informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés.

Toutefois, le défaut de respect de ses dispositions ne rend pas automatiquement la preuve résultant d’une surveillance illicite. En effet, la Cour considère que « L’illicéité d’un moyen de preuve, au regard des dispositions susvisées, n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. »

En l’espèce, la Cour d’appel avait jugé la preuve licite. D’une part, les salariés avaient été informés par note de service de la vidéosurveillance. D’autre part, la loi du 21 janvier 1995 autorisait l’utilisation de système de vidéosurveillance dans des lieux ou des établissements ouverts au public particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol afin d’y assurer la sécurité des biens et des personnes. Or, selon la Cour d’appel, c’était bien le cas d’une pharmacie dans le contexte d’insécurité régnant à Mayotte.

Mais la Cour de cassation remet en cause cette solution car elle considère que les salariés n’ont pas été informés de la finalité de surveillance du traitement : « En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que le système de vidéosurveillance destiné à la protection et la sécurité des biens et des personnes dans les locaux de l’entreprise, permettait également de contrôler et de surveiller l’activité des salariés et avait été utilisé par l’employeur afin de recueillir et d’exploiter des informations concernant personnellement la salariée, ce dont il résultait que l’employeur aurait dû informer les salariés et consulter le comité d’entreprise sur l’utilisation de ce dispositif à cette fin et qu’à défaut, ce moyen de preuve tiré des enregistrements de la salariée était illicite et, dès lors, les prescriptions énoncées au paragraphe 6 du présent arrêt invocables, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »