Conditions de réparation du préjudice d’anxiété du salarié

Nombreux sont les salariés exposés à des risques particuliers dans leur travail notamment du fait de l’exposition à des matières dangereuses. Ces risques peuvent générer une inquiétude, une anxiété. Cette anxiété est-elle source de préjudice réparable ? Les salariés peuvent-ils demander à leur employeur de les indemniser d’un tel préjudice ?

Si le principe en a déjà été admis, les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité restent incertaines. Un arrêt de la Cour de cassation rendu le 13 octobre apporte d’utiles précisions (Cass. Soc. 13 oct. 2021, n° 20-16.584, 20-16.598, 20-16.599). Les salariés exposés au benzène avaient saisi le Conseil de Prud’hommes d’une demande d’indemnisation d’un préjudice d’anxiété. En appel, la Cour avait admis ce droit à réparation. La Cour de cassation énonce tout d’abord que «  En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante ou à une autre substance toxique ou nocive, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité. » Puis, elle indique que « Le préjudice d’anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition au risque créé par une substance nocive ou toxique, est constitué par les troubles psychologiques qu’engendre la connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave par les salariés. ».

Ces conditions avaient déjà été posée dans un arrêt rendu par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation le 5 avril 2019 (Ass. Plén. 5 avr. 2019, n° 18-17.442).

Mais en l’espèce, l’arrêt de la Cour d’appel est cassé parce qu’elle a seulement considéré que « La réalité de ce préjudice résulte de l’établissement d’une attestation d’exposition à destination des salariés, lesquels ont été informés à cette occasion de la possibilité de la mise en œuvre d’un suivi post-professionnel, que l’anxiété des salariés est la conséquence directe de l’appréciation de la situation par les autorités médicales et sanitaires, qui se traduit compte tenu des conséquences potentielles au niveau de l’état de santé d’une exposition à une substance nocive et dangereuse par la mise en œuvre d’un suivi particulier si les salariés le souhaitent, que les salariés justifient à ce titre d’une inquiétude permanente générée par le risque de déclaration à tout moment d’une maladie liée au benzène, avec le risque d’une pathologie particulièrement grave pouvant être la cause de leur décès, qu’ils justifient ainsi de l’existence d’un préjudice d’anxiété en lien avec un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. »

Il faut donc démontrer davantage que la peur générale d’avoir une maladie. Il faut démontrer que le salarié a subi personnellement des troubles psychologiques résultant du risque élevé de développer une pathologie grave.